Dégradations au campus Condorcet : après, on fait comment ?

Communiqué de la section Sgen-CFDT de l’EHESS à propos des événements survenus sur le campus Condorcet

Un établissement d’enseignement supérieur et de recherche est un outil de travail qu’il faut respecter et protéger.

La section Sgen-CFDT de l’EHESS condamne sans ambiguïté les dégradations et exactions qui ont accompagné l’occupation du bâtiment de l’EHESS sur le campus Condorcet du mercredi 20 avril au samedi 23 avril 2022.

Notre syndicat exprime son soutien et sa solidarité aux personnels techniques, administratifs, enseignants, chercheurs et étudiants de l’École qui ont eu à subir ces exactions et dont le lieu et les moyens de travail ont été saccagés. Le bureau de Christophe Prochasson a été mis à sac et vandalisé. Les tags de menaces visant sa personne sont inadmissibles.

La tension qui régnait sur le site n’a jamais interdit de venir assister aux assemblées générales, comme a pu le constater, sur place, le Sgen-CFDT. La liberté d’aller et venir a été respectée, sous fortes contraintes. Cette tension, matérialisée par la circulation dans les étages d’individus cagoulés, de noir vêtu, affichant ostensiblement pour deux d’entre eux leur appartenance aux black blocs, exigeait la mise en place de la politique de télétravail décidée par la présidence afin de protéger l’intégrité physique et psychologique du personnel.

À l’initiative du président du campus Condorcet, Jean-François Balaudé, le bâtiment de l’EHESS, le seul occupé sur le Campus, a été évacué pacifiquement, sans intervention des forces de l’ordre, le samedi 23 avril. Comme des occupants l’ont annoncé sur un site, « aucune arrestation ni contrôle d’identité n’est à déplorer. » Un chien de vigiles a mordu un occupant lors d’un incident rapporté à l’AG du vendredi 22, avant l’évacuation donc.

Le Campus Condorcet, fermé depuis le jeudi 21, rouvre ses portes à partir du mardi 26 avril. Fortement dégradé, le bâtiment de l’EHESS reste fermé jusqu’à nouvel ordre. Le présentiel est suspendu sine die.
Pourtant, on peut lire sur les murs de l’École : « Nik le distanciel qui réprime nos luttes ».

Les dégâts ne sont pas que matériels

On doit craindre que les milliers d’euros nécessaires aux travaux de remise en état réduisent à rien les crédits mobilisés par l’EHESS pour l’accueil des collègues ukrainiens au titre de sa participation au programme « Pause » d’aide aux réfugiés scientifiques, de même que les financements déjà réduits des doctorants non contractuels.

Ce type d’occupation des établissements universitaires, scandé par des formules et des mots d’ordre qui tiennent lieu de pensée, quoi qu’en aient dit ses partisans, porte atteinte à l’indépendance et à la liberté académiques des SHS. La rhétorique outrancière qu’on y pratique a des effets d’intimidation évidents.
Silence, on ne tourne pas : on transforme toute forme de « dissent » en déclaration de guerre, en promouvant la conflictualité comme seule analyse et unique débouché aux problèmes vécus et au malaise étudiant. On ne peut s’empêcher de relever que de telles actions interviennent au moment même où les SHS sont en butte à des attaques récurrentes et systématiques.

L’École s’est retrouvée à l’intérieur d’un mouvement qui a concerné, dans l’Ile de France, aussi bien l’enseignement supérieur que des lycées du centre de Paris. Cette occupation était prévisible.

Son résultat est désastreux. La dégradation extrême d’un bâtiment neuf livré il y a à peine 9 mois atteint l’infrastructure et affaiblit le projet du Campus Condorcet dans son ensemble. Elle imprimera une marque durable. La vie ne reviendra pas à l’identique.

Il ne suffira pas de repeindre pour rebâtir. Mais c’est rebâtir qui importe à toutes et à tous.

Le Sgen-CFDT demande donc que, dans l’avenir le plus proche :

  • la présidence envisage, en instaurant une procédure de contrôle d’accès si nécessaire, la réouverture du bâtiment afin de permettre aux chercheurs, aux enseignants-chercheurs, aux étudiants et au personnel administratif qui le souhaitent, d’avoir accès à leur bureau, une fois les relevés des dégâts matériels réalisés. Il va falloir « faire avec » le bâtiment dégradé. L’EHESS restera ainsi au travail, malgré tout.
  • la demande formulée depuis plusieurs mois, dans le cadre du CA, d’un lieu étudiant dédié, distinct de la « Cabane » existant sur le Campus, situé dans ou proche du bâtiment de l’EHESS soit étudiée de près.
    Le Sgen-CFDT demande que les étudiants de l’EHESS soient consultés dans le cadre d’une enquête sur la configuration idéale de ce lieu et sur ses modalités de gestion ; qu’une Commission de suivi de projet soit constituée, et que puisse être envisagée une forme d’architecture éphémère, par exemple sur la friche qui jouxte le bâtiment de l’EHESS.

­Il faut enfin que des contacts aient lieu entre la présidence et l’ensemble des acteurs de l’École (organisations syndicales et syndicats étudiants compris) pour assurer et garantir de manière collective et responsable la protection des outils et du lieu de travail dans les mois à venir.